Samba Sissoko : danseur au grand cœur
En ce mois de Mai 2017, la saison se termine pour le danseur, chorégraphe, fondateur de l’association Street’s Light. Bien plus qu’un simple professeur, c’est avec envie et passion qu’il enseigne à ses élèves, les bases et les valeurs du hip hop pour les aider au mieux à évoluer dans le domaine de la danse. La lycéenne Camélia Sghayare l’a rencontré pour Quartiers en Nord.
Comme toujours, Samba, plus connu sous le nom de « Basam » dans le milieu de la danse, ouvre la porte avec son grand sourire. Grands yeux ronds, tenue streetwear, « Check ! » en guise de salut, son comportement est le même avec tous. Son bureau est à son image : simple, bordélique et décontracté. Du haut de ses 28 ans, c’est un homme joyeux, ouvert et attaché au vivre-ensemble.
Fondateur de l’association Street’s Light, cet enfant d’une famille d’origine Sénégalaise se dévoue aujourd’hui à transmettre sa passion à des élèves qui souhaitent progresser dans le milieu de la danse hip hop. Il organise galas, concours et battles et fait de son mieux pour que les rêves de ses élèves puissent se réaliser : se faire un nom, progresser, et pourquoi pas… se professionnaliser.
« Mes parents m’ont aidé à me montrer attentif aux besoins des autres », explique le jeune homme.
La notion de mixité, en effet, lui tient à cœur, et ses cours voient se mélanger des danseurs de tous horizons. Les personnes issues de milieu modeste côtoient les plus aisées, dans une ambiance familiale où la différence n’existe pas. Donner les moyens à ceux qui souhaitent réussir est très important pour Samba. Plus qu’un cours, il propose un accompagnement personnalisé. Souvent, c’est du sur mesure.
« J’ai essayé de développer une plateforme d’enseignement basée sur l’approfondissement artistique. Certains sont prêts à se lancer sur la voie de la professionnalisation, mais le plus important, c’est de garder ce côté social en travaillant avec un public parfois en difficulté. »
Samba a grandi dans le quartier de la Bourgogne et le quartier du Virolois à Tourcoing, parmi ses six frères et sœurs, avec qui il partage la fibre artistique. La danse est arrivée dans sa vie à l’adolescence. Plus tourné vers le foot au départ, c’est grâce à ses grands frères qu’il a fait ses premiers pas dans le hip hop. L’un d’entre eux, Alassane alias « Mister Bouloubala », est aujourd’hui une figure du rap local. Hyperactif, Samba est incapable de rester sans rien faire. Très engagé dans la ville de Tourcoing, où il a fréquenté dès son plus jeune âge la MJC et les divers centres sociaux, il n’a pas tardé à se faire sa place.
Éducation populaire
Aujourd’hui, quand il sort dans la rue, tout le monde lui dit bonjour. Et les valeurs de l’éducation populaire qu’on lui a inculquées, c’est lui qui les transmet. Il en a même fait son métier, après l’obtention d’une licence en Art et culture, option Danse, il a aussi fait des études dans l’animation sociale, qui lui ont permis d’apprendre à construire des projets, toujours en lien avec l’éducation populaire. En parallèle, ses expériences en tant que danseur ont balisé un parcours plus personnel. Deux événements ont marqué des tournants décisifs.
« En 2006, j’ai réalisé ma première grande scène devant des milliers de personnes, en dansant avec les actrices de Bharati pour Lille 3000 lors de l’année de l’Inde. Puis il y a eu la demi-finale aux championnats du monde de Singapour. »
Sa carrière, depuis, a trouvé écho au-delà des frontières. Sa passion lui a donné la chance de découvrir d’autres sociétés tel que le Japon, le Brésil, la Guinée. Ces découvertes ont suscité ses envies de transmettre ses compétences pour élargir l’horizon des jeunes qu’il côtoie. Il organise donc désormais des échanges internationaux avec d’autres compagnies de danse. Après le Brésil l’année passée, c’est aux Etats-Unis que partiront prochainement ses élèves les plus motivés.
« Soit tu pues, soit tu défonces tout ! »
D’après ses élèves, on ne peut pas passer une heure avec Samba sans rire. Toujours à l’écoute, même lorsqu’il ne s’agit pas du domaine de la danse, Samba sait aussi se faire remarquer. Son rire mythique et son style de danse ne passent pas inaperçus. Sa spécialité ? Le « Popping » : il aime jouer avec son corps, « faire le robot », onduler son corps dans tout les sens.
« C’est un homme plein de vie, qui ne se prend pas la tête mais qui sait être très sérieux quand il le faut » raconte une de ses élèves. . « Avec Samba on peut parler de tout et de rien, il sera toujours là pour nous conseiller. »
Ce que Samba fait découvrir à ses élèves, c’est aussi une facette du hip hop plus artistique que celle que l’on connaît habituellement. Le monde des « battles », très compétitif, il l’a laissé derrière lui au profit de la création.Dès qu’il le peut, il réunit plusieurs de ses élèves pour former des troupes comme D’Dream avec qui il a monté le spectacle « La plume » en janvier dernier. Pour en faire partie, évidemment, ça se mérite. Le milieu de la danse hip hop reste un monde très sélectif, il faut être rigoureux, attentif, motivé, et surtout avoir confiance en soi. Samba en a fait un leitmotiv humoristique qu’il répète souvent :« Soit tu pues, soit tu défonces tout ! »
Jamais seul
Pour le futur, Samba Sissoko a encore des projets plein la tête ! Il compte élargir le périmètre géographique de son association pour pouvoir découvrir et faire découvrir de nouveaux talents. Mais à ses yeux, pas de projet sans collectif. L’entraide doit rester primordiale, pour lui qui essaie toujours de prendre en compte les réflexions de chacun. L’association Street’s Light est née comme ça, et les liens très forts qui unissent ses membres ne sont pas étrangers à leur réussite sur les planches.
Aujourd’hui, Samba est considéré par beaucoup comme un grand frère. Il pousse les plus jeunes à ne pas baisser les bras, à ne pas abandonner. La danse est devenu pour eux synonyme de moments de partage, de joie, de belles rencontres.
« C’est une famille. En cas de souci, on sait que l’on pourra toujours compter les un sur les autres. »
Camélia Sghayare